Journal
L’architecture du musée expose, dans le prolongement des œuvres de Pierre Soulages, la force géométrique de ses structures traversées d’ombre et de lumière.
Conçu comme un musée dans un jardin, le musée Pierre Soulages prend la forme d’un long socle, duquel émergent cinq monolithes d’acier rouge corrodé.
Les Outrenoirs de Pierre Soulages poussent à son paroxysme la dynamique qui motive ma démarche photographique : une proposition réduite à l’essentiel, engageant le spectateur à interpréter le réel en fonction de la place qu’il occupe physiquement dans l’espace.
Le noir positive la matière, que la lumière creuse et révèle.
L’œil se surprend à distinguer les nuances qui agissent entre ces extrêmes, les forces qui s’opposent à la lumière et à la transparence de l’esprit…
Le spectateur devient révélateur : Négatif et Positif s’inversent, l’un prenant la place de l’autre.
Le noir du négatif photographique est blanc sur le papier, en même temps que le blanc du film passe au noir.
Ainsi le noir est blanc, le creux est plein, l’absence est présence…
Lumière et ombre sont les deux éternelles voix du monde
Zarathoustra
Je me rappelle cette après-midi d’enfance au cours de laquelle j’avais découvert l’ombre que mon corps projetait sur la terrasse de la maison familiale.
Fasciné, j’avais commencé par jouer avec elle comme avec une nouvelle amie. Elle me suivait partout… Quoi que je fasse et où que j’aille, elle restait fidèlement soudée à mes pieds.
Ainsi, depuis ma naissance, mon corps faisait un écran à la lumière du soleil, matérialisant ma silhouette en négatif sur le sol.
À mi-chemin entre le soleil et les ténèbres, longtemps j’étais resté ébloui par la nature de ce lien secret.
Peter Schlemihl, l’homme qui avait vendu son ombre au diable, en avait fait les frais…